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Mais qui a réellement besoin du Business Intelligence?

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Lors d’une récente conférence du TDWI donnée à Chicago, Cindi Howson de BIScorecard présentait les résultats d’une enquête qui révèle que dans les grandes organisations, 25% des employés utilisent des solutions de Business Intelligence (BI) et que les répondants de ces mêmes organisations croient, en moyenne, que 80% de leurs employés pourraient bénéficier de ce type de solution. Le rapport BI Survey 9, datant de  novembre 2010, recense pour sa part qu’au sein des organisations sondées, 21,5% des employés utilisent les applications BI.

Howson affirmait, lors de sa conférence, que 100% des employés d’une organisation pourraient bénéficier du BI. Cette dernière affirmation pourrait nous rendre perplexes, car le chiffre semble plutôt exagéré. Nigel Pendse, analyste bien connu dans le domaine du BI, apporte quelques nuances dans une interview donnée à IT Business EdgePendse croit que souvent, ces chiffres sont nettement exagérés par les vendeurs de logiciels qui ont tout avantage à vendre plus de licences.

Essayons d’y voir plus clair. Mais qui donc a besoin du BI dans une organisation?

Comme l’indiquent Davenport et Harris dans leur ouvrage Analytics at Work :

[Les solutions de BI] ne doivent pas être des applications isolées réservées à des occasions spéciales comme les campagnes de marketing. Au contraire, les applications et outils analytiques doivent être utilisés de manière routinière par les travailleurs de l’information et ils doivent être intégrés à leur travail quotidien.

Ici, la notion de « travailleur de l’information » nous aide à mieux comprendre qui est l’utilisateur typique du BI. Pour plusieurs, dont Mark Bower, il existe plusieurs catégories de travailleurs de l’information. En particulier, on retrouve les « travailleurs du savoir » (knowledge workers), catégorie d’employés définie par Peter Druker dans les années 1960. Le travailleur du savoir a comme principal capital « son savoir ». C’est un professionnel dont le savoir particulier (éducation et expérience) est le principal outil de travail. Druker prévoyait à l’époque qu’on retrouverait de plus en plus de travailleurs du savoir au sein des organisations dans les pays industrialisés. Les statistiques lui donnent raison, nous y reviendrons.

Voyons voir qui sont ces travailleurs du savoir. Une étude publiée par Statistique Canada en 2003 dresse une liste des corps d’emploi considérés comme travailleurs du savoir. La liste publiée est exhaustive, résumons-la ici. On y retrouve principalement trois catégories :

  • Les gestionnaires
    • cadres supérieurs et directeurs
  • Les professionnels
    • les professionnels de la finance, de la comptabilité et des ressources humaines
    • les ingénieurs et autres professionnels des sciences, des mathématiques et de l’informatique
    • les architectes
    • les avocats et notaires
    • les professionnels de l’enseignement
    • les professionnels de la santé (médecins, dentistes, pharmaciens, thérapeutes)
  • Le personnel technique (dans certains domaines)
    • sciences de la vie et sciences physiques
    • ingénierie, électronique, informatique

À la lecture de cette liste, on reconnait plusieurs utilisateurs typiques des applications BI.

Un autre aspect intéressant que révèle l’étude de Statistique Canada, c’est le nombre croissant de cette catégorie de travailleur sur le marché de l’emploi (comme l’avait prédit Druker). Tous secteurs confondus, la proportion des travailleurs du savoir est passée de 13,8% en 1971 à 24,7% en 2001. La progression étant linéaire, on pourrait extrapoler cette proportion à 28% pour 2011. C’est chez les gestionnaires que l’augmentation est la plus forte : les gestionnaires représentaient 6,1% des travailleurs en 2001 contre 1,6% en 1971. C’est presque 4 fois plus!

Ceci confirme les chiffres avancés par Howard Dresner dans son ouvrage intitulé The performance management revolution. Selon Dresner, les travailleurs du savoir représentent au moins 25% des travailleurs dans les pays industrialisés, toutes industries confondues. Dans les secteurs de pointe tels que les services financiers, le domaine de la santé, les hautes technologies, ce pourcentage serait beaucoup plus élevé.

Selon les données recueillies en 2001 dans l’étude de Statistique Canada, les secteurs où l’on retrouve la plus grande concentration de travailleurs du savoir sont le secteur des services aux entreprises (65,8% des employés) et le secteur des finances et assurances (41,7% des employés). Les secteurs qui suivent sont l’exploitation des ressources naturelles, les communication et services publics ainsi que le commerce de gros. Ces données canadiennes doivent ressembler à celles que l’on recueillerait aux États-Unis, en France, en Allemagne ou au Royaume-Uni.

Il semble clair que les travailleurs du savoir – qui représentent en moyenne 25% et dans certains secteurs jusqu’à 65% des employés  – peuvent bénéficier du BI. Les gestionnaires en particulier, mais aussi les autres travailleurs du savoir, sont amenés à réfléchir et à prendre des décisions pour améliorer la performance de leur organisation, de leurs clients et partenaires. Ils doivent donc manipuler de l’information et la mettre au service de leur savoir. Les outils de BI sont là pour ça.

Mais qu’en est-il des autres travailleurs de l’information?

Les autres travailleurs de l’information, bien qu’ils ne soient pas des travailleurs du savoir, manipulent de l’information à répétition dans le cadre de leur travail. Ils réalisent un travail plus encadré et codifié, moins axé sur la résolution de problème que sur l’application systématique de procédures.  Mais le caractère répétitif de leur travail n’enlève rien à sa complexité ni à la nécessité qu’il soit supporté, pour être efficace, par des outils informationnels riches comme les solutions BI. On retrouve dans cette catégorie de travailleurs les opérateurs de centres d’appel, les agents de service dans les banques, les commis de bureau, les secrétaires, etc.  Il est maintenant reconnu, avec la démocratisation du BI, que cette catégorie de travailleurs de l’information peut bénéficier du BI, aussi ciblé soit-il, pour mieux réaliser leur travail.

Cela rejoint les positions d’Evan Rosen, qui, dans un article publié dans Bloomberg Businessweek, indique que les organisations ne peuvent plus considérer la majorité de leurs employés comme de simples exécutants, mais plutôt comme des employés qu’il faut impliquer dans le processus décisionnel à tous les niveaux. Nous serions donc portés à inclure une grande portion des travailleurs de l’information dans notre liste des utilisateurs potentiels du BI.

En conclusion, on pourrait facilement avancer que dans les organisations ayant une majorité de travailleurs de l’information comme dans le secteur des finances, des banques ou de l’assurance, le nombre d’utilisateurs potentiel du BI est très grand. Le chiffre de 80% révélé par l’étude de BIScorecard serait donc plausible.

Mais pour passer du 25% actuel au 80% potentiel, il y a du pain sur la planche! C’est en partie à nous, professionnels du BI, que revient la responsabilité de démontrer tout le potentiel de ces outils à cette large communauté d’utilisateurs. Il est nécessaire de mettre en place des solutions supportant chacune des fonctions organisationnelles tout en utilisant des outils adaptés à chaque catégorie d’utilisateur. Un beau défi pour les années à venir!